mardi 4 janvier 2011

Terre & Mer

L’intelligence a été donnée à l’homme pour lui permettre de dresser le constat de "l’éternelle imposture" sur laquelle repose la marche du monde ; une fois cette prise de conscience effectuée, la vie se révèle belle et joyeuse. Il s’agira alors de ne viser que son accomplissement, dégagé le plus possible des contraintes exercées par le Léviathan social.


"Je ne peux pas supporter l’idée qu’un homme puisse en dominer un autre, surtout pour une question d’argent." ; "Les nouilles ne nourissent pas aussi bien qu’on le prétend chez les mangeurs de canard." ; "Si vous essayez depersuader un chat ou un chien que Dieu existe, il ne vous écoute pas..." ; "Je suis un ennemi de l’autorité." Des centaines d’aphorismes et de citations de celui que René Fallet définissait comme "un poète qui descend dans la rue comme une émeute."

Dans les discours du catastrophisme scientifique, on perçoit distinctement une même délectation à nous détailler les contraintes implacables qui pèsent désormais sur notre survie. Les techniciens de l’administration des choses se bousculent pour annoncer triomphalement la mauvaise nouvelle, celle qui rend enfin oiseuse toute dispute sur le gouvernement des hommes. Le catastrophisme d’État n’est très ouvertement qu’une inlassable propagande pour la survie planifiée - c’est à dire pour une version plus autoritairement administrée de ce qui existe. Ses experts n’ont au fond, après tant de bilan chiffrés et de calculs d’échéance, qu’une seule chose à dire : c’est que l’immensité des enjeux (des "défis") et l’urgence des mesures à prendre frappent d’inanité l’idée qu’on pourrait ne serait-ce qu’alléger le poids des contraintes sociales, devenues si naturelles".

Confrontant la réflexion politique et écologique à des valeurs, et redonnant à la sensibilité et à l’humour une place qu’ils n’auraient pas dû perdre, ce livre ne propose pas de théorie toute faite pour assurer la survie de l’espèce. Mais, à travers ses chapitres brefs et pénétrants, qui sont autant d’analyses de la réalité concrète dans laquelle nous vivons, il nous invite à reprendre à notre compte et à poursuivre l’interrogation. Et nous suggère que, pour remettre sur ses pieds un monde qui marche sur la tête, c’est en chacun de nous que doit s’opérer le rétablissement.
La décroissance n’est pas la croissance négative. Il convient de parler d’« a-croissance », comme on parle d’athéisme. C’est l’abandon d’une foi ou d’une religion, celle de l’économie, progrès et développement. S’il est admis que la poursuite indéfinie de la croissance est incompatible avec une planète finie, les conséquences (consommer moins) sont loin d’être acceptées. Il est encore temps de changer de trajectoire et d’imaginer un système reposant sur une autre logique : une société de décroissance.


Après l’extermination de la mégafaune par nos ancêtres chasseurs-cueilleurs, la socialisation de la nature se caractérise, avec l’apparition de l’agriculture et d’une société de classes, par la concurrence pour le surplus de production. Une logique à l’œuvre notamment dans les grandes civilisations englouties : Sumer, Rome, Mayas, etc. Mais les sociétés industrielles modernes se distinguent par leur compétence sans précédent à dominer la nature, avec une capacité unique dans l’histoire : détruire les écosystèmes à l’échelle planétaire. Pourtant, l’idéologie dominante, fondée sur le culte de la croissance, persiste à nier que notre organisation sociale engendre ces comportements mortifères. Un renversement des valeurs et une modification de la relation des humains entre eux sont aujourd’hui indispensables à la survie des espèces.

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