mardi 20 décembre 2011

poèmes


La barque de tes yeux
a chaviré mon cœur.
Entre le ciel et ton visage
Je flotte dans ta chevelure,
Comme au bord d’ une branche
Un songe dans sa fleur.
Une voile s’approche
Dans les vagues mourantes
Rose de frissons neufs.
Elle murmure
Ton doux nom
De chair et de tendresse.
Eaux mêlées de ma voix
Breuvage de ton rire
Je savoure ton miel
Aux rayons du couchant.
Sur le sel de ma peau
Tu as posé les mains
Et nos corps ont chanté
De douces harmonies.

Venner yann05:080 commentaires

poésie

samedi 18 octobre 2008


En fidèle marin





En fidèle marin,

sur les chaloupes de la nuit,

je pêche

les songes qui dérivent.



Quand le jour s'éteint

l'océan enveloppe mes rêves.



Je chavire alors dans ses vagues

et nage vers le levant.

J'aime écrire entre ses lignes

changer d'horizon.



Dans les nues du matin

je t'ai vue baigner nue ;

et, au soleil naissant

apparaître

poitrine dressée,

nouvelle femme dans l'immensité.



D'un petit signe tu m'invites

vers un rivage inconnu.

Je pose alors ma plume

et, léger,

vole vers ta caresse

pour découvrir tes lignes

à l'horizon.

Venner yann21:270 commentaires

Haute fleur


Haute fleur de lumière
La chaleur des nénuphars
S’élève jusqu’à ton cou.


Tu arrives vers moi
toute ensoleillée d’existence
Bouche emplie de fraîcheur d’herbe.

Tu es l’aube dans mes bras.


Nous n'irons plus mourir de langueur
à des milles de distance
dans nos rêves bourrasques
dans la soif craquelée de nos lèvres

 épaules baignées de vols de mouettes
non !


J'irai te chercher
nous vivrons sur la terre.


Coule-moi dans tes mains de soie
tête la première pour ne plus revenir,
si ce n'est pour remonter
debout,
à ton flanc -
nouveau venu de l'amour du monde.


La poésie n'est pas du vent, c'est le vent qui est poésie. YV.


Et je te confierai...


…Et je te confierai les rêves de mon âme



Les mots sont des briseurs de cercle :



parfois, ils sont la chance, et la seule  qui nous reste :



encore faut-il savoir les jeter par la fenêtre.



*



« Lorsque les Aborigènes parcourent les pistes chantées et scandent les récits de l’origine des temps, ils font alors partie des ancêtres et entrent dans le Temps du Rêve. Le Temps du Rêve n’est ni une mesure du temps, mais le domaine même des ancêtres, un univers parallèle dans lequel les lois ordinaires du temps, de l’espace et du mouvement ne s’appliquent pas et où passé, présent et futur ne font qu’un. »

Assurément, la Terre est le lieu de notre destin. Elle est d'abord le lieu de notre mémoire. C'est là que sont enterrés nos morts. C'est là que nos prédécesseurs ont laissé les traces de leur quête - et conquêtes -, les fruits de leurs créations. De ce fait, elle est aussi le lieu de notre formation. En son sein, devenus des êtres de langage, nous avons entrepris un dialogue de fond avec nos semblables, avec l'univers des vivants et, comme irrésistiblement, avec une forme de transcendance. Car, si transcendance il y a, c'est encore à partir de la Terre, à partir des données de la Terre que nous pouvons l'envisager, que nous pouvons en dire quelque chose de valable. A travers ce dialogue à grande échelle et à tous les niveaux, nous apprenons à nous initier au vrai et au beau.

La fraternité est toujours possible avec ceux qui aiment leur condition, si inhumaine soit-elle, et là où la fraternité est accordée à un nouveau groupe d'hommes la libération matérielle ne lui est plus guère longtemps refusée.

dimanche 11 décembre 2011

critique de 2 romans sur le vin

Cocktail cruel









Quatrième de couverture:


Entre Côtes d’Armor et Côtes de Beaune, le monde de la mer et celui du vin vont se rencontrer. Sous la forme d’une talentueuse actrice de cinéma, née en Bretagne. Elle va tomber sous le charme d’un propriétaire négociant en vins de Bourgogne. Il est de plus producteur de films.
Isabella et Antoine, entourés de deux soeurs appelées les vignoleuses, vont vivre un très bel amour, jusqu’au jour où le destin s’en mêle... Entre Beaune. Jobigny La Ronce, L’île-Grande et Saint-Brieuc.
L’infernal ballet cinématographique, sous le signe de la science et du vin, va être animé par une double enquête entre Bretagne et Bourgogne. Deux commissaires de police auront alors à décrypter un film plutôt noir. Un roman qui rend hommage au monde de la nature, du vin et du cinéma.
Mon avis:

Eco-polar... voici un terme qui peut faire peur et attiser en même temps non pas la convoitise mais une certaine curiosité. N’étant pas adepte de l’écologie mais férue de polars, le désir d’en savoir un peu plus sur ce livre singulier s’imposa à moi. En effet, le contexte était intéressant et prometteur: deux meurtres dans les chais, une belle balade entre Bretagne et Bourgogne... tous mes sens étaient en éveil. Associer le monde vinicole au cinéma, le tout lié par un meurtre, l’entreprise était audacieuse.
C’est le meurtre d’une comédienne, Isabella Elgé (Isabella Le Gonidec pour le civil) qui va déclencher l’histoire. Le commissaire Létourneau et son adjoint vont être chargés de l’affaire. Les choses se compliquent lorsque l’oncle de la victime, Ambroise, décède à son tour. Certes, on aurait pu croire à un choc émotionnel mais si vous lisez ce livre, vous verrez que l’histoire est bien plus compliquée qu’il n’y paraît.
Et si le commissaire, qui n’est pas sans me faire penser à un savant mélange entre Sherlock et Maigret, est confronté à une enquête plutôt coriace, la difficulté ne réside que dans le scénario. En effet, le style de l’auteur est simple, sans toutefois être simpliste, ce qui rend la lecture très agréable. Elle n’est pas dénuée d’un certain charme. J’ai lu ce roman en une après-midi et j’ai passé un moment agréable.
Petit bémol: le roman fait la part belle aux souvenirs des personnages, mettant de côté pendant bon nombre de pages, l’enquête policière. Ce n’est pas désagréable en soi, c’est même plutôt novateur mais j’avoue préférer la structure d’un polar classique. En même temps, on peut comprendre également ce parti pris dans la mesure où les réminiscences peuvent s’associer, cinématographiquement parlant, à un flash-back.
Je vous conseille ce livre si vous voulez vous évader l’espace d’un instant dans les vignes et les paysages merveilleux de la Bretagne et de la Bourgogne.
Un grand merci aux Agents Littéraires ainsi qu’à l’auteur pour ce partenariat.

Extrait:

C’est de l’étranger et dans sa chambre d’hôtel qu’Antoine apprit l’affreuse nouvelle. Il venait à peine de se réveiller, comme alerté par un coup de fil imminent. Moment où la conscience est encore dans les limbes. Prémonition subite ! Impossible d’y croire... Il n’avait même pas compris, au début de la conversation, qui l’appelait.
- ... Désolé de vous apprendre une aussi triste nouvelle par téléphone, avait dit Létourneau au terme d’une longue phrase.
- ... Vous dites "désolé", comme vous diriez "bonjour !"... Vous m’apprenez que ma fiancée est morte, et que vous êtes désolé ! Et moi donc..; J’apprends la mort de l’être le plus cher à mes yeux et...
On entendit un long soupir, un homme qui frotte sa barbe naissante... Et puis des sanglots... Létourneau ne savait plus que dire. Il garda le silence, attendant que son interlocuteur réagisse.
- Et comment l’a-t-on retrouvée ? Je veux dire...
" Troublé le producteur. Amoureux fou, sûrement ! " songea Létourneau qui prit le temps de répondre. Il posa ses mots.
- C’est un vieux vigneron qui nous a alertés. Isabella votre compagne gisait dans sa cave, tuée par balles, la cave saccagée par l’assassin lui-même, comme s’il voulait se venger de quelque chose, ou détourner les soupçons... Cela ne vous dit rien... ? Vous n’auriez pas le moindre indice, le moindre soup...
- Je n’ai que ma détresse Monsieur le Commissaire, que ma détresse... Vous comprenez ?

Les Coccinelles du diable





Les Coccinelles du diable de Yann Venner



Quatrième de couverture :


2010 : année internationale de la biodiversité, exposition universelle de Shanghai.
Ce roman est une enquête au pays de la vigne et du vin. Le petit village de Jobigny La Ronce, ainsi que le Domaine de La Clairgerie, ne se trouvent sur aucune carte. Disons qu'ils sont proches de Beaune, en Bourgogne. Tout au long d'une intrigue dans laquelle se côtoient science, écologie, drame et fantaisie, l'auteur nous invite "à cheval sur le vin", à découvrir des paysages étranges, sur lesquels de drôles d'insectes font la loi.
Les Coccinelles du Diable - métaphore de la peur de l'Autre, du "péril jaune" - mais véritable fléau - déchaînent les passions. Planète folle, crimes odieux, climats agités, le vin se troublerait-il ? Logiquement, oui ! Mais la logique n'est-elle pas le dernier refuge des gens sans imagination ? La Nature, mal gérée par l'homme, est bien plus dangereuse qu'une arme à feu. Et si le repas gastronomique des Français se retrouve inscrit au patrimoine immatériel de l'humanité, n'oublions pas que le vin en représente l'esprit.
Mon avis :
Encore une fois, je remercie Yann Venner pour m'avoir offert ce livre lors de notre entrevue au salon des écrivains bretons.
Les Coccinelles du diable est la suite de Cocktail cruel. On y retrouve donc certains personnages, notamment le commissaire Luc Létourneau, Antoine et les soeurs vignoleuses, Jacinthe et Philippine. On sent dans cet éco-polar tout l'amour de l'auteur pour la vigne et ce qui l'entoure. On en apprend beaucoup et tout ce qui est écrit ici est très sérieux. D'ailleurs, les remerciements se situant à la fin du livre en disent long sur tout le travail de recherche accompli par Yann Venner pour nous faire partager le monde vinicole. Je dirais qu'il y a deux parties dans le récit, bien que l'auteur ait scindé le roman en quatre : La première, consacrée à ce monde dont je parlais et la deuxième, au polar proprement dit. Mais comment faire la transition entre les deux me direz-vous ? C'est là où l'écrivain est habile car c'est ce lieu qui va justement être le point de départ. Je n'en dis pas plus pour ne rien dévoiler. Et lorsqu'un cadavre est retrouvé, c'est à Létourneau d'entrer en scène. Le tout est bien ficelé et, jusqu'à la fin, le lecteur est en haleine, voyageant, cette fois, entre la Bourgogne et l'Asie.
Seul petit bémol : évidemment, ce n'est que mon avis sur la question, mais je trouve que la partie polar est légèrement mise de côté au profit des connaissances sur le vin et les coccinelles.
Ceci dit, il s'agit d'un livre qu'on lit avec grand intérêt.
Extrait :
(...) Qui aurait ainsi pénétré dans le château, profitant que la victime soit seule ? Cette personne entre, élimine Roland Morgeot par un moyen encore à découvrir, introduit un fichier qui éclot à l'intérieur de l'ordinateur...
- Et le coupable disparaît sans laisser de trace... Envolé grâce à ses ailes, je présume ! répondit Luc Létourneau de façon ironique. Ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit !
- D'accord, j'ai trop d'imagination, mais j'essaie de trouver un fil conducteur à toute cette histoire ! Il y a une corrélation entre le mystérieux visiteur et la coccinelle asiatique, j'en suis persuadée !
- C'est bien possible ! Qu'ont dit les collègues enquêteurs de la brigade informatique ?
- Qu'un fichier a été introduit dans l'ordinateur - soit par Roland Morgeot sous la contrainte, soit une fois l'individu éliminé (...)

SITES AMIS

Newsletter

Recherche personnalisée
Web

mercredi 9 novembre 2011

exergues & préface de mon dernier roman "LES COCCINELLES DU DIABLE"


Si nous buvons du vin, c’est pour respirer un moment, hors de nous-mêmes. Puisse-t-il en être ainsi de la lecture.





« Toute civilisation qui se préoccupe de survivre doit accomplir ses devoirs envers le vin. Le maintien d’un grand cru est la plus durable des écoles d’art. »



Raymond Dumay





« En Bourgogne, quand on parle d’un climat, on ne lève pas les yeux au ciel, on les baisse sur la terre. »



Bernard Pivot









































« Imaginer, c’est hausser le réel d’un ton. »



Gaston Bachelard











PREFACE







De tout temps, le vin a inspiré des formes d'art prisées par les élites aussi bien que par le peuple : poésie, littérature, peinture, musique, chant, sculpture… Que le roman policier s'y intéresse ne saurait donc surprendre. Lors du 3° salon Livres en Vignes, qui se tint au Clos de Vougeot en 2010, l'un des débats s'intitulait: "Le vin, pousse au crime littéraire…"



Breton originaire de la Côte de granite rose, Yann Venner connaît bien la Bourgogne pour l'avoir maintes fois visitée, en avoir dégusté les crus et y avoir trouvé la compagne de sa vie. Dans Les Coccinelles du Diable, il explore à nouveau la veine "éco-viticole" du polar. En 2010, il avait publié Cocktail Cruel qui a pour cadre la Côte de Beaune et la Bretagne. Le lecteur retrouvera, avec plaisir, dans son nouvel opus, quelques personnages de son précédent roman: le négociant beaunois Antoine de la Clairgerie, les "Vignoleuses," deux sœurs bretonnes qui, dans leur laboratoire mettent au point des solutions à base d'algues marines destinées à protéger la vigne, Létourneau, le commissaire qui, à sa manière, porte les valeurs du terroir… Mais, à l'heure de la mondialisation du vin, le roman de Yann Venner nous entraîne aussi en Chine et nous fait rencontrer l'attachante Xinhua.



« Les Coccinelles du Diable » tient à la fois du roman policier et du roman de science-fiction. Côté polar, les statistiques montrent avec une éloquence quelque peu dérangeante que la campagne n'est pas épargnée par le crime. En son temps, Brassens ne chantait-il pas: "Nous, au village, aussi, l'on a de beaux assassinats?" Quant à une invasion du vignoble par des coccinelles diaboliques venues d'Asie, espérons qu'il s'agisse bien d'une fiction. Toutefois, l'histoire nous rappelle que le vignoble bourguignon faillit plusieurs fois disparaître sous les assauts des urebères, écrivains, gribouris, noctuelles, "vers coquins," et autres pyrales… Au XIX° siècle, la menace ne vint pas d'Asie mais d'Amérique avec l'oïdium, le phylloxéra, le mildiou… Conscients de leurs responsabilités environnementales, les vignerons, de plus en plus nombreux cessent de lutter contre les fléaux de la vigne avec des pesticides et pratiquent la viticulture raisonnée, biologique, voire biodynamique.

Mais en aucune façon ce livre n'est une thèse. S'ils incarnent des préoccupations actuelles, les protagonistes restent des personnages de chair et de sang. Yann Venner nous fait découvrir une région qu'il aime, un métier qu'il respecte, un produit qu'il apprécie en connaisseur. Il chante le charme de la Côte de Beaune et de la vigne. Discrets, l'humour et la poésie surgissent au détour de phrases finement ciselées.



Trêve de bavardage, Les Coccinelles du Diable est un roman qu'il faut déguster, de préférence avec un verre de bourgogne à la main.







CLAUDE CHAPUIS, professeur à l’ESC Dijon, chargé de cours à l’Institut Jules Guyot.
















La poésie, ça n'a pas de prix !

jeudi 13 octobre 2011

ww

Trieste, ville d'écrivains, dot Claudio Magris, Joycz, Rilke, & bien d'autres qui ont éclairé cette ville autrefois autrichienne. C'était un grand port et le seul appartenant à l'Autriche, quel débouché !

Aujourd'hui, ville italienne avec son vent quasi annuel & plus ou moins frais, avec ses terrasses de café où l'on commande un Nero !
Le journal "Il Piccolo" rend compte quotidiennement de tout cela : une vie métisse, jeune, ensoleillée, active...
Une université brillante, des étrangers nombreux...
J'ai aimé Trieste durant la semaine où je résidai chz mon amie ANNA Zoppellari, professeure d'université !

Brigitte et moi y avons passé une fantastique semaine, avec l'Alliance Française pour finir... Apothéose, joie, partage et bonne nourriture !
Merci à ANNA, à Véronique Goffin, & à tous les Triestins qui ont pu acheter ou consulter mes romans sur la ...Bretagne....!





mes parents, très chers

Posted by Picasa

poètes, vos vers sont-ils pleins de folie, de raisin, de raison ?

Posted by Picasa

lundi 19 septembre 2011

Début du roman : "Les coccinelles du diable" à paraître, début novembre 2011








LES C CCINELLES



DU DI BLE








Eco-Polar

Yann Venner





Je dédie ce roman à mes parents.









Paul Eluard

Extraits du « Dit de la force de l’amour », écrit en 1947 pour l’ouverture d’une émission de radio.

« Hommes, femmes (…) qui, perpétuellement, naissez à l’amour, avouez à haute voix ce que vous ressentez, criez « je t’aime » par-dessus toutes les souffrances qui vous sont infligées, contre toute pudeur, contre toute contrainte, contre toute malédiction, contre le dédain des brutes, contre le blâme des moralistes.

Criez-le même contre un cœur qui ne s’ouvre pas, contre un regard qui s’égare, contre un sein qui se refuse. Vous ne le regretterez pas, car vous n’avez d’autre occasion d’être sincère (…) Votre cri vous fera grand et il grandira les autres. Il vient de loin, il ira loin, il ne connaît pas de limites.


Parlez, les mots d’amour sont des caresses fécondantes. Les autres mots ne sont là que pour la commodité de la vie. Aimer, c’est l’unique raison de vivre. Et la raison de la raison, la raison du bonheur. Vous obtiendrez toujours grand enchantement d’aimer, et même de la souffrance d’amour.

Les plus grands des poètes ont affronté diversement, avec courage et avec faiblesse, les difficultés de la vie, mais leurs chants d’amour relèvent l’homme de son bourbier. »











Non pas le sommeil agité

Ni les balbutiements pâteux

Mais le rubis qui s’illumine

Sur la robe de la cuvé

Quand je tiens entre mes deux doigts

Le pied du verre à déguster

Humer le bouquet et trouver

Un poème pour la saison



Et puis dans l’accompagnement

Des saveurs à multipler

Animer la conversation

Qui va découvrir des domaines

Où l’on n’osait s’aventurer

Et où les vignes du savoir

Proposent de nouvelles grappes

Pour les oiseaux et les amants.







Michel Butor







































































PREMIERE PARTIE



LE DEUIL





CHAPITRE UN





La rencontre.



Elle se posa sur une des vitres de la véranda. La plus basse ; celle qui était légèrement fêlée et que Jacinthe m’avait demandé à plusieurs reprises de remplacer.

Confortablement installé dans mon rocking-chair, un verre d’aligoté à la main, je détaillai la bête qui se déplaçait maintenant avec précaution, explorant son nouveau territoire. D’une taille plus imposante que nos coccinelles indigènes, jaune avec ses points noirs, elle semblait interroger avec lenteur la plaque de verre du bout de ses six pattes. Le coléoptère avançait vers la zone d’ombre afin sans doute d’échapper à la chaleur qui sévissait depuis ce matin. Un vent léger venait de se lever dans les vignes et je pouvais entendre le doux bruit de sa chanson qui caressait les tendres feuilles.



La coccinelle s’immobilisa enfin dans l’angle supérieur gauche, semblant y avoir trouvé un peu de fraîcheur.



Un deuxième coléoptère se posa sur mon verre, élytres déployées. Lui aussi était jaune et tacheté de noir. Je tendis un doigt vers l'insecte comme font les enfants pour les attirer au bout de leur index en fredonnant plusieurs fois la célèbre comptine : « Petite coccinelle envole toi, il fera beau demain… ». Jusqu’à ce que l’insecte s’envole de nouveau.

Mais je n’étais plus un enfant, et d’une pichenette, j’envoyai valdinguer la bestiole. Le beau temps commençait sérieusement à m’agacer. Nous étions à la mi-mai, il faisait plus de trente degrés depuis trois jours ! Une chaleur sèche et persistante  s’était installée depuis le début du printemps et pas une goutte d’eau n’était tombée en quarante cinq jours ! Les voisins les plus proches du domaine ne semblaient pas dérangés par cette météo intempestive. J’entendais leurs cris idiots et le bruit des flaques d’eau qu’ils s’envoyaient à la figure. Elles claquaient ensuite sur les dalles carrelées de leur piscine, comme pour mieux me narguer.



Ce bien précieux, cette eau si nécessaire, cette manne céleste…

Et ces naïfs qui ne songeaient pas une seconde qu’elle viendrait un jour à leur manquer.



-         Au moins eux, ils vivent l’instant... Cesse de vivre dans le passé Antoine.



Phrase que Jacinthe me serinait souvent. Elle m’avait quitté le matin même, rejoindre sa sœur en Bretagne, me reprochant chaque jour un peu plus ma mélancolie.

J’étais seul, veuf, inconsolable.



Et le vent se mit à chanter dans les vignes, un peu plus fort. Une chanson d’amour défunt, d’amour détruit. Je vidai mon verre et me resservis.

















































































CHAPITRE DEUX





Entomologique.



Intrigué par cette nouvelle espèce d’insecte, je consultais les sites parlant de ces coccinelles.





Traditionnellement, notre amie coccinelle jouit d'une bonne réputation : elle ne pique pas, ne vole pas de manière agaçante et surtout,  mange les pucerons, les cochenilles, ce qui en fait un précieux allié du jardinier. Cependant, l'arrivée de la coccinelle asiatique a changé cette perception et transformé l’image de la bête à bon dieu en petite peste dont on voudrait se débarrasser.



Cette coccinelle asiatique présente une grande variabilité de couleurs, sa robe allant du noir au jaune, en passant par le rouge et l’orange. La variabilité de couleurs et de motifs la rend assez difficile à reconnaître. Certaines variantes sont identifiables grâce à une tache noire en forme de M ou de patte de chat sur le pronotum, mot savant qui désigne une partie de la tête  de la coccinelle.
Très féconde et vorace, la coccinelle asiatique menace les espèces indigènes, non seulement en entrant en compétition avec ces dernières pour la nourriture et l'espace, mais aussi en se nourrissant des larves des coccinelles locales.
En automne, elles se regroupent pour chercher un abri pour l'hiver et peuvent envahir par milliers les maisons en utilisant toutes les ouvertures possibles. L'insecte entre alors en hibernation et ne cause pas de dégâts. Cependant, lorsqu'il se sent menacé, il émet un liquide nauséabond jaune orange qui  tache.







Près d’un quart de ces insectes adultes mordent, pouvant aussi causer des dommages aux fruits. Certains viticulteurs qui vendangent à la machine rencontrent également des problèmes : les insectes présents sur les grappes et pressés avec le raisin donnent un goût acre au vin.



Harmonia axyridis est une espèce de coccinelle asiatique qui a été importée aux USA dans les années soixante afin de lutter contre les pucerons dont elle est très friande, mais ce n'est qu'en 1988 que l'acclimatation a été notée. L'Europe l'a également introduite plus récemment dans les cultures sous serres puis à destination des particuliers en mettant à disposition des larves à déposer sur les plantes dans les jardineries. L'intention était louable dans la mesure où il s'agissait de lutter contre le développement des pucerons dans les cultures à la place des pesticides.





« Pourquoi donc n'avoir pas privilégié nos espèces locales ? » me disais-je.

Cette coccinelle originaire de Chine, de Corée et du Japon s'est tellement bien adaptée qu'elle envahit désormais des régions entières en progressant du nord vers le sud. En vente en Belgique depuis la fin des années quatre-vingt-dix, elle a envahi la Flandre en quatre ans ! L'invasion de la France est avérée. Aujourd'hui elle est présente sur une grande partie du territoire. Elle a récemment été découverte en Loire-Atlantique et les observations se multiplient dans le Pays-de-la-Loire, en Bourgogne, en Franche-Comté et en Rhône-Alpes.

Inoffensive pour l'homme, elle prolifère néanmoins au détriment des espèces endémiques comme notre coccinelle à sept points. La larve de cette coccinelle peut s'attaquer aux larves des coccinelles locales lorsque sa nourriture vient à manquer ou que l'occasion se présente. Les coccinelles asiatiques se regroupent à l'automne grâce à une substance qu'elles émettent et se déplacent en groupes pour trouver un refuge pour passer l'hiver. L'intérieur d'une maison sera souvent privilégié.

Une nouvelle fois, pensai-je, l'homme en essayant d'intervenir sur la nature en introduisant cette espèce a contribué à un profond déséquilibre. Il faudra désormais compter sur cette nouvelle espèce invasive avant qu'un nouvel équilibre se fasse.





















CHAPITRE TROIS



« Miracle d'aimer ce qui meurt. »





Le vin blanc que je produisais était délicieux et n’avait heureusement pas le goût bizarre apporté  par l’apport de coccinelles mélangées aux raisins dans les pressoirs.  Ces bestioles sévissaient dans pas mal de vignobles alentours depuis quelque temps. Imaginez en plus les grains de raisins envahis par les déjections de ces  bêtes du Diable !



«  Encore un coup des écologistes, pensai-je. Ils ont introduit cet insecte sans réfléchir aux conséquences ! En imposant leurs propres méthodes, ils viennent contrarier une viticulture raisonnée, que beaucoup de vignerons appliquent. »



Mon nouveau vignoble d’une douzaine d’ouvrées - à peine plus d’un demi-hectare, était planté pour moitié de chardonnay et pour l’autre d’aligoté. Je l’avais acheté récemment puisqu’il était à vendre et surtout contigu au Château de La Clairgerie, le  grand domaine viticole de mes ancêtres. L'attirance pour le bon vin, pour tout ce qui concernait les travaux de la vigne avait fini par l'emporter à la fin de mon adolescence et depuis vingt cinq ans j’avais repris le domaine familial.

Viticulteur ne s’improvisait pas, mais j’avais vu Ambroise Durelier, mon si mal nommé « beau-père », à l’œuvre.  Enfant et adolescent, j’avais essayé de l’aider chaque année aux travaux de la vigne, mais il me repoussait toujours, jaloux de mes nobles origines. Paix à son âme.²

J’aidais donc chez les autres et sur mon propre domaine. Je suivis des cours au lycée viticole de Beaune, m'attelais aux travaux de la terre et retrouvais peu à peu les gestes de mes pères. En quelques années, je repris tout le domaine en main et aidé de mon fidèle maître de chais, Louis Franck, nous hissâmes les vins du Château de La Clairgerie au sommet de leur gloire. Ma tante Jacinthe, « maman Jacinthe » comme je l'appelais étant gamin - qui m’avait élevé à la mort de mes parents - m’avait donné, en plus d’une culture littéraire, le goût du cinéma. Je devins – outre producteur de vins de Bourgogne, à force de volonté et grâce aussi à une certaine aisance matérielle, producteur de films. Je rencontrais alors la femme de ma vie. La grande actrice Isabella Elgé. Nous vécûmes un amour inouï, sa mort nous sépara





Aujourd’hui, sa dépouille  reposait en terre bretonne… Isabella avait été assassinée et depuis plusieurs mois, je n’étais plus qu’une ombre.



² Voir le roman précédent : « Cocktail cruel »

La bouteille d’aligoté était à moitié vide. Une autre coccinelle grimpa le long de mon bras et je la laissai faire. Plus le courage de lutter, plus envie de me battre contre des moulins. J’entrai alors dans la maison aux volets clos et allai m’allonger sur mon lit défait. D'autres insectes étaient entrés dans la chambre par la fenêtre entrouverte. Ils voletaient en désordre se cognant aux murs dans un vol hémisphérique. Autant de bêtes en un même lieu était plus qu’intriguant. Me revint alors en mémoire une partie de mes cours de sciences à propos des prédateurs et de leurs victimes.



La chaîne alimentaire est le processus qui fait qu'un animal est la nourriture d'un autre, et que cet autre animal sert à son tour de nourriture pour d'autres espèces et ainsi de suite. Par exemple, le puceron est mangé par la coccinelle qui est attrapée par l'araignée qui est la nourriture d'un oiseau qui devient la proie d'un renard... C'est la loi du plus fort qui mange le plus faible.



Ainsi donc, ces coccinelles asiatiques, voraces et déboussolées allaient devenir un fléau pour nombre de vignerons ? Et pour d’autres professions vivant de l’agriculture ?… Elles avaient pris le pouvoir en déséquilibrant peu à peu la chaîne alimentaire. On connaissait les invasions de criquets sur toute la planète depuis des siècles, des pluies de crapauds, des armées de doryphores dévorant les pommes de terre… La nature perdait les pédales et mettait bien du temps à effacer ces calamités qui pouvaient affamer l’homme en lui ôtant une grande partie de sa nourriture. D’autant plus que les oiseaux si friands de coccinelles ne pouvaient à eux seuls en dévorer des millions. Le rapport des forces en présence était trop déséquilibré. Les victimes virtuelles n’avaient plus assez de prédateurs et l’homme devait à son tour intervenir, trouver des solutions à court terme tout en pensant à l’avenir.

Le désordre s’était installé. Qui allait avoir l’intelligence et l’audace de le juguler ?



Puis le sommeil me prit et assommé par mes trois verres de vin blanc, je m’endormis ; façon peu glorieuse de ne pas affronter la réalité en face. J’entendis du fond de sa tombe, à travers la voix d'une poétesse inconnue, Isabella m’appeler, me tendre ses bras. Magie du rêve, miracle d’aimer ce qui meurt.


« Tu me caresses. Et je deviens terre inconnue à moi-même dont tu découvres minutieusement le relief ; terre étrangère à la physionomie insoupçonnée, courbes dont nul n’a su les détours que j’apprends avec toi. Nuque, épaule, sein, taille, hanche, cuisse, tu me déroules, tu déroules ce paysage sinueux, cette harmonie de versants, de collines, de bassins, de sillons – et ces plages offerts à ma paresse comme un loisir indéfini, épaule, sein, cuisse…Tu déploies mon corps en un lumineux labyrinthe, tu ouvres en lui de moelleuses perspectives dont je perçois, comme à distance, l’insolite. Face ignorée, tu me dévoiles.

Ou peut-être m’inventes-tu ? Je suis un vœu que tu prononces, que formulent tes doigts. »



Voilà ce qu'entendait Antoine dans les  paroles récitées d'Isabella. Il se jura de recopier ces vers et d'en trouver l'auteur.