jeudi 23 juin 2016

plusieurs poèmes

Blues spirite

Un burlot farfadeur s’en allait à la ville
Un jour de marchadé pour y vendre sa claine
Il espérait bien fort en tirer quelques mille
Pour s’offrir par la suite une vaste putaine
Chemin faisant la pauvre claine larmichait :
La bolcherie cruelle l’attendait au tournage
Imbibé de spirites
Aux rades alentours
Notre burlot slipeux crapardait de traverse
Notre claine inspirée chiqua la blessamore
Pour inciter son maître à différer la vente :
« Krébonguiou ma clainette, qu’as-tu donc à blairer ? »
Burlotait notre andouille écumant et crachant
« Je m’en vais t’aligner une valse aux adieux ! »
Si donc fit le bougrin et la triqua si fort
Qu’elle en crevit la beîte comme une pauvre claine
Adieu les gros billets et la vaste putaine
Le burlot tout confit n’avait plus que sa haine
Pour pleurer sur son sort et sa déconfitaine

Fin de campagne

…L’orateur ne parvenait pas à clôturer son discours.
Il avait utilisé des mètres de littoraliture, de bobarbelés galvanisants et d’hexamètres dactyliques hyperbranchés.
De toute façon, le courant ne passait plus dans la salle. L’auditoire étouffait
sous l’âcre remugle d’une foule croupissante ;
et l’atmosphère, pleine comme un œuf, était à son comble.
On entendait bien ça et là, de temps à autre, quelques ronflementsonges qui ponctuaient avec peine
l’interminable spitche.
Trop dense, le discours courait comme un torrent furieux.
Un hurlementsonge final du grand blablateur
fit grésiller les sonotones
et brusquement, l’assistance assistée,
rallumant ses écouteurs et rassérénée,
se remit d’aplomb pour embrayer la Marionnaise finale.

La campagne était close dans la grande Cité,
ouverte à tous les vents
de la vieille patrie pétomaniaque




Grappe
Les grains bavardent clairs au cœur de la nuit brune :
-                     Je mûrirai, dit l’un,
et désaltérerai le gosier d’un puissant,
la gorge d’un enfant,
le palais d’une reine.
-         J’abreuverai dit l’autre et je caresserai
les papilles des hommes
    quand je serai plus grand.
-          Moi, dit encore un autre,
je ne mûrirai pas je suis déjà mourant
car je vis dans la peur de me voir englouti.
-         Tu ne vivras jamais le plaisir du partage,
l’offrande de ton jus,
la connaissance offerte, la grume délivrée.
-         Dessèche-toi bien vite pour laisser de l’espace
Aux autres grains pressés de devenir bouteille.

« A cheval sur le vin » riez frères humains !
La divine boisson sera notre chanson
et nous galoperons en joyeux échansons
pour verser dans vos verres
les crus de l’univers !



Avant que le soleil ne fonde
En une douce flaque ronde
J’aurai trouvé la bonne bonde
Heureusement la rime abonde


Le renonçant

Je suis le goliard de Condate
Le clerc vagant qui vous épate
Je peux jongler avec six balles
Raconter la vie Hannibal
Courir le risque de mourir
Et de vous faire parfois sourire

Je suis le joglar le manant
Le va-nu-pieds qui par les champs
Sème un air de belle innocence
Sur la glèbe de la souffrance

Je suis des enfants l’amuseur
Des rois le triste séducteur
Et si j’obéis à leurs lois




C’est pour mieux leur mordre les doigts
Quand je mange à leur table d’hôte
Pousse-toi de là que je m’y ôte

Et je m’en vais Caïn caha
Traînant ma misère et mon chat
Et je m’en vais par ci par là
Voir si des fois je n’y suis pas



La semence de mon destin
A été livrée au moulin

Je ramasse un épi doré
Futur froment de ma jeunesse

Le soleil tamise mon sang
Caresse le cou de l’été

Et je m’endors entre tes blés
Joli meunière fille du vent



A quoi bon

Quand l’existence est détestable
Qu’on a du chagrin plein les yeux
Quand l’évidence est exécrable
Et qu’ça irait p’têt un peu mieux
Si ça vous grattait moins la gorge

Quand y’a plus d’feu au fond de la forge
Qu’on na plus le cœur à la fête
Ni rien pour s’égayer la tête
À quoi qu’ça sert à quoi qu’ça sert
De sourire et de semblant d’faire

De faire aller comm’ci comm’ça
De r’sasser et d’avouer tout bas
Bonjour Monsieur comment ça vit ?
Mes hommages à vos canaris !
Et vous Madame à votre porte
Enchanté de vous savoir morte !

A quoi bon larmer sur son sort
Se r’garder s’dire qu’on est encore
Un être humain une apparence
De quelqu’un d’bien



Qu’a pas eu d’chance
A quoi bon s’poser des questions
Y’a-t-il un sol une solution
Un exutoire un palliatif
Une raison d’vivr’ un vrai motif
Bonsoir Monsieur toujours en vie ?
Tordez l’cou à vos canaris !
Et vous Madame sur le seuil
Combien voulez-vous de cercueils ?

Même discours même oraison
Je vais me faire sauter la caisse
Même folie même détresse
Je vais m’faire sauter le caisson
Foutre le feu à ma paillasse
Mett’le feu à mon paillasson

Quand l’existence est détestable
Qu’on a du chagrin plein les yeux
Il est l’heure de quitter la table
Et d’s’envoyer aux septièmes cieux
***

" I hope it is no crime to laugh at all things – for I wish to know
what, after all, are the things but a show.” Lord Byron









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